Imaginer le bâti va de l'avant, en faisant renaître des idées vieilles comme un monde... d'avant. Des familistères de Godin ou des ensembles de Le Corbusier à la tour Triangle, une boucle se boucle. Rêves de pyramides, fantasmes d'architectes...
- DVSM, 25 mai 2022. Réunir trois inconvénients pour en faire un possible avantage...? C'est peut-être ce vers quoi se dirigent des concepteurs qu'il va falloir ranger dans une nouvelle famille. On y retrouvera les architectes, les urbanistes, les concepteurs d'environnement et les experts de l'équipement commercial. En cause, des évolutions que des événements récents ont fait surgir. La pandémie a dopé les envies de télétravail, une perspective certes favorable par certains aspects, mais semant le doute sur le devenir de bureaux jusqu'alors édifiés à raison de dizaines, voire centaines de milliers de mètres carrés. Une distribution physique réduite à la fois par des seniors qui consomment un peu moins et par l'émergence du commerce en ligne a mis l'équipement commercial face à une évolution impensable lorsque la croissance était encore la règle. Il lui faut pouvoir s'ajuster, éventuellement et notamment se réduire dans des proportions cohérentes avec des fluctuations à terme inévitables. Au moins deux pôles qui menacent ces surfaces d'une instabilité préoccupante. Face à elles, le logement présente un caractère de stabilité plus réconfortant. L'hypothèse qui frémit se nourrit donc de l'idée de créer les conditions d'un mélange possible, commerce, travail et logements.
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Récemment, Jean-Maris Tritant, Président du Directoire de Westfield Unibail Radamco, qui a hérité du projet quelque peu gigantissime de la future tour Triangle, défendait, ce qui est inédit, le choix d'une part des surfaces de cet édifice comme devant se prêter à une évolutivité entre bureaux et logements, ce derniers n'étant plus tout à fait imaginés pour seulement la vie des ménages. Trop de bureaux vides, voilà de quoi effrayer. La montée en puissance du télétravail faisant ainsi d'un lieu de vie un espace incluant une proportion professionnelle. Et reviennent des idées qui ont traversé l'histoire, celles de projets et de réalisations ayant toutes cette même cohabitation au moins du travail et du logement, parfois commerce et loisirs y étant ajoutés. Ce qui oblige, à la lumière de ces expériences, à prendre en compte ce qui a bien fonctionné dans cette vision du construit, et ce qui s'est heurté à des obstacles. L'un d'eux, et pas des moindres, étant qu'une fois l'attrait de la nouvelle forme passée, ne plus bouger de chez soi, ne plus se rendre sur un lieu de travail, peut devenir lassant, et même ressembler à une contrainte. Au fond, l'individu a démontré sa préférence souvent ultime à bien séparer la vie tout court du "boulot". Le mélange commerce et habitat se heurte à une envie du même esprit. Tout consommateur aime "aller voir ailleurs" en matière d'approvisionnement, et plus simplement, n'a pas davantage souhaité renoncer à profiter, de temps à autres, d'un peu de promenade, vitrines, shopping. Pour ne pas sombrer dans la ritournelle pesante, dès que l'on peut, on sort. De ce trait de comportement, quel que soit le concept, si concentrant soit-il, jamais on nul ne sort.