USA : Sur fond de chamailleries, le vrai problème de Tesla n'est pas Trump, mais bien... Tesla.

10 Juin 2025

Dans l'industrie, le vrai talent ne consiste pas à lancer des innovations mais à réussir à les faire vivre durablement face au reste du monde. Regard sur (au moins) deux erreurs qui mettent soudain en question l'avenir de Tesla.

---DVSM---

- DVSM, 10 juin 2025. Pour un industriel, l'expression "seul au monde" n'existe pas. À cette maxime très concrète, il serait possible d'en ajouter une autre.: "pas plus d'une innovation majeure à la fois". Ces deux réalités pourraient bien avoir conduit la firme pilotée par Elon Musk sur la voie d'une possible sortie de route. Dans le numéro Hors Série "Spécial Salon 2011" de l'Auto-Journal, relégué loin en fin de pagination, dans les chapitres consacrés aux automobiles hors des grandes séries, un roadster signé Tesla. Il est décrit comme animé par une "notoriété planétaire portée par la folie de l'électricité". Le très court chapitre qui lui est consacré rappelle seulement qu'il est à ce moment fabriqué chez le britannique Lotus, à Hethel, dans le Norfolk (UK), avant son assemblage final à Menlo Park, en Californie. Cette "bourgade" de la Silicon Valley, d'un peu plus de 30.000 habitants, abrite de nombreuses entreprises, dont le siège de Meta (Facebook etc...). Atout majeur du roadster que souligne alors cette bible annuelle de la presse automobile française : "des accélérations qui font oublier les moteurs thermiques", mentionnant un 0 à 100 en 3,7 secondes. Il y a presque 15 années, et alors que le Model-S, n'est encore inscrit que dans un certain futur, Tesla par cette option pour l'électricité, s'est rangé dans une originalité, à des années-lumière de la production de masse de l'industrie automobile. Pourtant, derrière ce rêve d'une voiture aux performances ébouriffantes, s'en ajoute un autre, l'autonomie. Non dans le sens de la distance franchissable, mais de la capacité à fonctionner totalement automatiquement. Un robot des nationales, en quelques sortes. Notons que ce fantasme du véhicule sans conducteur s'imagine plus commode à réaliser avec une motorisation électrique, bien mieux qu'en espérant dompter de la même manière les humeurs et chaleurs des mécaniques thermiques. En embuscade dans cette vision inédite de l'auto, il ne faudrait surtout pas voir qu'un défi de technicien... La recette est "titillante" pour un manager fougueux ayant fait fortune avec la revente de l'illustre PayPal. Car, sans doute largement inspiré par l'atmosphère de la Silicon Valley, c'est aussi le possible "Operating System" appliqué et surtout vendu à l'industrie, toute l'industrie, un peu comme le sont Windows (Microsoft) et iOS (Apple) à la planète connectée, bases sans lesquelles rien ne fonctionne. Oui, mais... Dans le même temps, sous les vents perturbateurs de l'écologie, sans cesse poussés par l'insatiable appétit tarifaire des vendeurs d'or noir, un mouvement se cristallise autour d'une fuite loin de ce monopole, pour se diriger vers un autre, celui des mégawatts d'or.

Depuis quinze ans, le ciel a toutefois pris de nouvelles nuances. Loin de fondre dans les attentes (réelles ou supposées telles) de performances "sur-fougueuses", de nourrir des ambitions de taxis sans chauffeur ou de mettre le cap sur du "hors pétrole", appuyé sur les frêles ressources des dites renouvelables, les visions de l'automobile ont dans la réalité surtout viré au décarboné, un dada politiquement bien plus correct, vivant presque exclusivement sous l'argumentaire politique dont dépendent quelques pourcentages charnières dans les élections, ces bulletins faiseurs de chefs d'états ou de gouvernements, ou à défaut, faiseurs de battus. Ceci sans oublier les grapillons d'adversaires intégristes et hargneux de l'auto, de toute l'auto, qui ne sont pas pour rien dans les épisodes des ZFE vécus actuellement.

Conséquence, le décor pour Tesla a changé. Déjà depuis plusieurs années, la firme a rencontré mille et un obstacles, posés par exemple sur le chemin des projets d'implantations hors USA. À l'image de l'interminable et "croustillant" feuilleton de l'immense usine berlinoise, finalement enfin implantée dans la zone de Brandebourg. La raison...? Tout simplement, ce qui n'est pas forcément avoué. On ne voit jamais d'un bon œil un concurrent venir manger "dans la gamelle des autres "(expression connue au moins dans le monde de l'industrie) et que des pressions ont à l'évidence donné du piment à cette aventure. Mais surtout, (à lire ICI), et comme KELEREPUS-le blog (le cousin de DVSM) l'avait il y a plusieurs saisons pressenti, Tesla qui tablait sur une sorte de profitable solitude sur son créneau, se retrouve aujourd'hui face à une industrie automobile qui a mondialement mis le doigt dans la propulsion électrique. Tous les constructeurs ont désormais à leur catalogue une offre bien échelonnée dans cette ligne. Mieux, ou pire, c'est selon..., tous ont la possibilité de proposer les mêmes modèles en versions électriques, thermiques et hybrides. Avec des réseaux constitués, des images de marque, des historiques... Tesla est le seul à n'offrir que des chevaux wattheures...! L'imprévu étant en général ce qui est le moins envisagé, truisme s'il en est, l'industrie chinoise est désormais en rythme de conquête explosive. Ce que même l'Auto-Journal n'avait pas réellement anticipé -ni aucun autre média- aux heures des premiers balbutiements de la Muskienne de Menlo Park. Pire -encore- Tesla a opté pour un mode de distribution qui, parallèlement, lui est également propre. Or, les réseaux de concessionnaires et agents, même moins en pointe que jadis, restent des fondements solides. On ne construit pas des bases commerciales de ce genre d'un simple geste, en deux temps et trois mouvements. Voilà pour Tesla beaucoup de handicaps soudain (enfin presque) à contrer. Alors que de surcroît, impression ici assumée, le style Tesla commence à prendre quelques rides. Or, en automobile comme dans bien d'autres domaines, la mode reste à la fois le dopant des marchés et son destructeur le plus expéditif. Certains auraient constaté un sérieux repli des ventes...? Impossible de dire "bizarre".