Les facteurs destructeurs du commerce dans Paris intra-muros, hors émeutes et violences, n'ont pas manqué. Faut-il encore pleurer sur le lait renversé...?
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- DVSM, 10 novembre 2023. "Toujours vivant". Il n'y a pas que Renaud à pouvoir chanter cette réconfortante affirmation. Laquelle ne s'entend pas sans un subtil ressenti de fragilité. Quand même...! La cession du BHV qui vient d'être concrétisée, n'est qu'un pas de plus dans un cadre victime d'une étrange stratégie. Le célèbre "grand magasin de centre ville" est passé par bien des tourments. Sa vie sous la houlette des Galeries Lafayette vient de s'achever. Un bon alibi pour partager quelques souvenirs, autres que ceux souvent retenus, sans oublier de rappeler l'ouragan anti-commerce qui a frappé l'activité commerciale de l'ensemble de la capitale. Rendons notamment à César ce qui lui appartient, et à Bertrand Delanoë ce dont il est largement responsable et, osons, présumé coupable. Avant l'actuelle détentrice de la mairie de Paris, c'est bien sous ce prédécesseur qu'ont commencé les manoeuvres visant à "dégoûter les parisiens de l'automobile" (sic). Le BHV, dans des turbulences mises en lumière il y a quelques mois, n'était plus depuis longtemps déjà qu'une ombre émoussée de lui-même, tout en gardant quand même et encore nombre de ses spécificités. Répétons-le, toujours vivant. Il n'est pas interdit de penser que ce grand magasin aura connu plusieurs moments bien délicats et quelques rafales de vents contraires. Souvenirs en vrac... Dans les années 50/60, il est le rendez-vous idéal et incontesté des bricoleurs avertis de la région "Paris et banlieue". Des quantités d'articles introuvables ailleurs en construisent la légende. Précurseur pour le centre ville dès les années 70, répliquant à sa manière aux larges amplitudes horaires pratiquées par les quelques jeunes hypermarchés et centres commerciaux, adeptes de fermetures le soir à 22h00, le magasin ose des nocturnes une fois par semaine. Moins plaisant, il subit les agressions d'un terroriste (ou pseudo terroriste, "détraqué" étant un terme mieux adapté) qui imposent durant plusieurs années des surveillances avec vigiles et fouilles pour tous aux entrées du public. Cependant, ce magasin va surtout subir dès ces mêmes années une double influence "venue d'ailleurs". Alors que le jour de repos des enfants à l'école passe du jeudi au mercredi, le rythme hebdomadaire du trafic dans le commerce parisien (entre autres) se bouleverse. Allant auparavant crescendo du lundi au samedi, ce dernier étant le plus animé, la rythmique se disloque sous l'effet simultané de cette transformation hebdomadaire et des ouvertures des centres commerciaux et grandes surfaces de périphérie. C'est d'ailleurs le véritable début d'un changement radical pour la commercialité* dans la capitale toute entière, comme dans d'autres grandes métropoles subissant le même bouleversement. (C'est le vrai début historique du déclin des centres-villes).
- Paris, rue de Rivoli, septembre 2001- Le pli est pris. Depuis mars de la même année, la capitale a un nouveau conseil municipal. Avec un couloir pour bus, taxis, vélos et patins à roulettes, seule la moitié de la chaussée reste praticable pour l'automobile. Cette vue se situe quelques centaines de mètres au-delà du BHV, le trajet que tout client motorisé doit désormais affronter pour s'éloigner du quartier. Bon courage...!
Autre souci, la circulation. La rue de Rivoli sature, et pour que la clientèle puisse se garer, mission devenant synonyme d'impossible, le BHV d'alors réagit. En créant une navette pour les clients motorisés entre un parc auto assez proche, avant que le magasin ne dispose de son propre parking souterrain. Cruel pour son sous-sol légendaire, arrivent aussi les grandes surfaces de bricolage ou GSB, en banlieue, avec sur un détail pas plus anodin que ceux déjà évoqués leurs accès pour les automobiles, vastes et gratuits (c'est important, gratuit) tandis que le BHV rationalise un peu ses offres. Et voilà, tout cela désormais se noie dans les souvenirs des parisiens, qui avaient déjà perdu leur Samaritaine, et se demandent désormais si le BHV pourra poursuivre longtemps ses activités. (C'est bien sûr ce que nous lui souhaitons).
Au fait, combien de ses fidèles pourraient souffrir de ne plus pouvoir aller déjeuner au self, tout là-haut, en regardant quelques fonctionnaires de la Ville de Paris s'activer dans leurs bureaux, juste en face...? Sont-ils occupés à compter les surmulots...?
L'addition dangereusement coordonnée d'un détricotage du potentiel commercial de la capitale, de l'épanouissement des structures commerciales de banlieue, et aujourd'hui d'un bouleversement des populations (tranches d'âges vieillissantes, générations jeunes moins nombreuses...) soulève mille et une questions vitales sur le commerce dans la capitale, d'autant plus qu'un acharnement municipal anti-automobile ne faiblit pas. La mise à mort, plus par stupidité que par volonté destructrice, ne serait-elle pas une action coupable, fruit d'une inconscience amplifiée par des spasmes morbides...?
* Commercialité n'est pas une notion très connue hors univers professionnel. C'est pourtant un élément d'évaluation du potentiel commercial d'un quartier, d'une rue, etc., lequel varie forcément sous l'influence de facteurs divers. Elle est évaluée à chaque sollicitation de la justice pour régler des différends. En un secteur, plus agissent de commerces bien menés qui y attirent une clientèle nombreuse, plus elle s'élève. Et inversement. Ce qui entraîne des incidences majeures, comme la valeur des fonds de commerces, celle des locaux, et des loyers stipulés dans les baux. Le repli de cette commercialité exerce un effet négatif pour ces éléments, et peut aller jusqu'à imposer aux propriétaires de "murs" des réductions notables de ces loyers, aux périodes prévues dans chaque bail régissant chaque occupation. Il faut noter que les influences extérieures ne sont pas les seules à induire des variations de la commercialité. Le commerce lui-même peut être la source de ses propres malheurs. Si quelques établissements clés se font peu performants (un boulanger grincheux, un charcutier traiteur aux mets peu savoureux, un boucher plus "semelle" que viande se coupant comme du beurre...), ou même des établissements affichant des amplitudes horaires trop réduites, la clientèle s'en va voir ailleurs. Il ne faut jamais oublier que dans l'univers de la distribution physique, l'individuel et le collectif sont indissociables, même dans les plus grandes et plus performantes zones commerciales.
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