ÉMEUTES, violences et mémoires courtes, l'influence du numérique trop peu pris en compte.

30 Juin 2023

Nombreuses sont les analyses par lesquelles on cherche à expliquer les colères et les mouvements qui secouent le pays, mais où les dimensions d'un monde devenu ultra communicant et les évolutions techniques qui ont "changé la vie" ne figurent qu'en filigrane.

---DVSM---

- DVSM, 30 juin 2023. Que de mémoires défaillantes...! Pas celles des ordinateurs ou des "devices" mobiles dits "smart" ou "intelligents", mais des gestionnaires des grandes causes et du quotidien. La fureur des émeutes que subit le pays est sans relâche comparée à celles qui, en 2005, parties de Villiers-le-Bel, au nord-est de la capitale, avaient plongé la France dans un interminable chaos. Dans les décorticages de la situation présente, bien peu songent à rappeler qu'en cette déjà lointaine époque, la vie numérique n'en était encore qu'à ses balbutiements. Les troubles évoqués se produisaient alors que le smartphone ne deviendrait un début de réalité que deux ans plus tard, dans ses toutes premières et timides apparitions. Réseaux sociaux et autres "numériqueries" même pas encore dans nos rêves, sauf peut-être pour le jeune Elon Musk. En 1989, en Chine, des troubles encore plus graves avaient mis la planète dans un état d'inquiétude majeure. Et pourtant, alors que la place Tian'anmen laissait filtrer l'image inoubliable d'un manifestant faisant barrage avec sa propre personne aux chars d'assaut de la force répressive, un phénomène inédit était également pointé du doigt, finement analysé comme significatif d'une modification profonde du contact des hommes envers leurs semblables. L'instrument de cette transformation irréversible n'était pourtant que le... fax, nouveauté qui avait permis aux citoyens chinois de faire parvenir vers le vaste monde les informations concernant leur situation. Un bien modeste équipement, au regard des réseaux d'aujourd'hui, ces "autoroutes de l'information", comme les experts de la prospective les baptisaient alors. Or, le plus étonnant n'est pas ce qu'en font les populations ou les groupes, fauteurs de troubles, terroristes ou voleurs inclus, mais que les responsables chargés de configurer les éléments de la sécurité n'aient finalement pas pris conscience de la puissance de ces outils (et imaginé des stratégies de réponse). Une chose est sans doute louable de faire évoluer les budgets militaires et d'envisager de se doter d'armes à la pointe du progrès, avions du futur et sous-marins nucléaires. Mais comment est-il admissible que si peu ait été bâti pour contrer efficacement les initiatives de petits voyous de maigre talent se préparant à aller défoncer un magasin Lidl ou semer la pagaille dans un centre commercial de premier plan...? Y.D.