Comparer la migration de l'auto thermique vers sa version électrique avec celle de la photo de l'argentique vers le numérique est un exercice intéressant, mais qui peut conduire à d'étonnantes (et fort discutables) conclusions. Voici pourquoi...
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- DVSM, 2 février 2023. La photo en version chimique est passée très vite à la mode électronique. Si vite que les professionnels (grands leaders de la photo) n'y croyaient même pas. Mais les apports de cette transition ont balayé comme une bourrasque une perception quasi séculaire de la photo classique comme un domaine tributaire, surtout pour le public, d'un coût élevé et d'une indéniable complexité. Le prix public d'un film de 24 ou 36 poses, film classique ou pour diapos, que l'on exposait sans même savoir si les clichés étaient nets (ou flous), bien éclairés (ou surexposés, ou l'inverse), et qui imposaient un passage payant vite onéreux par un labo pour enfin découvrir, à retardement, ce que l'appareil et son opérateur avaient réussi (ou raté), autant de maillons d'une chaîne qui n'étaient admis que parce que rien d'autre ne permettait de faire mieux et moins cher. L'arrivée de l'électronique numérique a tout changé. Les prises de vues sont devenues gratuites une fois l'appareil et la carte mémoire acquis. Les clichés se sont métamorphosés en images visibles immédiatement, imprimables de même que disponibles pour toutes sauvegardes même à long terme. Autant de paramètres qui ont changé la donne en un temps record.
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Dominique Seux, dans Les Echos, rapporte sous le titre "LA VOITURE ÉLECTRIQUE SUR LA FILE DE GAUCHE" que "Dans sa dernière interview aux Echos comme président de Valéo, Jacques Aschenbroich posait fin décembre cette question passionnante sur le rythme du passage de l’Europe vers le véhicule électrique : "Va-t-on basculer comme dans la photographie avec un numérique qui a balayé l'argentique ? Ou comme dans les télécoms où le téléphone fixe a été ringardisé par le smartphone ?". Une accélération des ventes de véhicules de la famille électrique (incluant toutes formes de l'hybride à la toute électrique) semble autoriser cette réaction "Nous avons un début de réponse". Cette question porte cependant très concrètement sur une transition très rapide, et moins sur les divergences entre les deux domaines. Auxquelles il convient d'en ajouter une, essentielle. Pour la photo, les industriels et la distribution n'y croyaient pas trop. Dans l'automobile, il semble que beaucoup y croient, peut-être... trop. Alors, bascule en un éclair ou presque...?
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Pas si sûr. Car d'un véhicule qui s'utilisait très simplement, ce basculement se présente ici d'une manière quasi opposée à celle de la transition photographique. Plus chère, avec des contraintes inédites de recharge et d'autonomie, l'auto va et probablement pour longtemps d'une grande domesticité à une utilisation beaucoup plus dépendantes de mille et un facteurs. Le summum dans les incertitudes sur cette migration tient dans le doute qui n'est pas mince à propos de la réelle "neutralité carbone" de l'auto électrique si, comme le soulignent avec insistance certains spécialistes, le bilan s'établit non sur la seule traversée d'une grande ville, mais sur l'intégralité de la chaîne, des matériaux avant la production jusqu'à la fin de vie notamment des batteries, un sujet aussi peu précis dans son "bout du bout" que celui des déchets nucléaires. (Rappelons que même au sein des écologistes, la préférence pour l'auto électrique n'est pas partagée). Ceci sans prendre en compte le coût, brut et social, d'une irrémédiable recomposition de l'industrie auto. En photographie, plusieurs grands spécialistes de l'ère argentique ont disparu dans la tornade numérique -pas seulement Kodak- , un effet amplifié par le phénomène des smartphones. Au moins deux géants de l'électronique, Sony et Panasonic, y ont pris des parts colossales dans la nouvelle structure du marché. Les grandes mutations techniques entraînent toujours de lourdes redistributions de cartes.
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