Après avoir mis à distance des activités qui les nourrissaient, des stratèges municipaux éloignent des cœurs urbains le commerce en en chassant ses clients. Et désormais, après l'intendance, l'âme de la ville s'en va vers un ultime sacrifice...
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- DVSM, 22 décembre 2022. Où suis-je.? Il y avait une ville, je ne la trouve plus. Voici venu un nouveau cataclysme, les "communautés de communes". Flash back, avant le constat... D'abord, il y avait eu les mouvements de périurbanisation, dans les années 1920-1940 outre-Atlantique, puis dans l'effervescence du baby-boom d'après guerre, notamment en France. Cette évolution, dans des époques suivant des conflits, n'était que la résultante arithmétique d'un accroissement important des populations. Il fallait bien qu'aillent habiter quelque part, ces jeunes des nouvelles générations, alors que leurs aînés occupaient déjà les zones intra-muros. Toutefois, l'histoire de la ville se nourrit de passés bien plus actifs qu'on ne le raconte à présent. Dans la plupart des villes, bourgs et villages -dont Paris- les quartiers furent jadis des lieux où logements et spécialités professionnelles se côtoyaient. Des activités séculaires qui vivaient encore largement après la seconde guerre mondiale. Puis virent peu après (dès les années 1950) les décennies "modernes", et des initiatives visant à créer hors des villes des zones résidentielle et d'autres pour des activités dédiées, commerciales, artisanales, industrielles... Initialement, ce mouvement a donc eu pour raison la nécessité d'aller où il y avait de la place. Un fractionnement qui a donné naissance à une organisation artificiellement morcelée de la vie au sens large, induisant des contraintes que l'on ne percevait pas encore comme peu pertinentes, comme la création de besoins multiples en déplacements. En a-t-on conscience aujourd'hui.? Pas si sûr. Rares ont été les analyses soulignant que la lente agonie du centre-ville n'était qu'une facette des conséquences de cette transformation séparant vie "à la maison", commerce et travail. Alors que pas un quidam ayant l'occasion de prendre une parole face à un quelconque auditoire n'omet de montrer d'un doigt accusateur une "grande distribution" (expression dans ce cas aux limites de l'insulte) fassoyeuse du bon, classique et noble petit commerçant.
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Nous en étions là quand sont sortis de leurs cachettes des opposants aux particules, au bruit, au trafic, à la couche d'ozone, lesquels ont doucement pris un pouvoir les autorisant à nettoyer toute cité de ses effervescences économiques et humaines. Comprenons-nous bien.: pas question ici de plaider pour une ville pleine de particules fines et autres nauséabondes et pathogènes émanations. Constat cependant bien réel : en en ayant chassé les humains et leurs engins, les villes seront effectivement nettement moins polluées. Toutefois, personne n'a manqué de remarquer, dès l'an 2000, les enchaînements que la Chambre de Commerce de Paris soulignait, finalisés par la fermeture de nombreuses boutiques, suite aux empêchements de circuler, savamment élaborés par la municipalité Delanoë, qui de surcroît n'en était pas peu fière...! Sans voiture, moins et, finalement, plus assez de clients, non seulement pour se déplacer, mais aussi transporter achats et famille (ou l'inverse), les rideaux de fer dégringolent. La capitale n'est pas la seule à subir des mauvais sorts de ce genre. Nous en étions là, mais revenons à cette nouvelle suite.
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Arrive en effet ce nouveau et encore peu dénoncé (cela viendra) nouveau cataclysme, ces "communautés de communes", ou formes comparables. Nouveau, c'est beaucoup dire. Dès les années 1960, des agglomérations ont choisi de mettre en commun des éléments de leur vie économique et sociale. Fondamentalement, ce n'est pas stupide. Lille fut au nombre de ces pionniers, et condamner cette forme de communauté urbaine serait naturellement une erreur. D'ailleurs, en région parisienne, nombreux sont les franciliens qui pestent contre une gestion parisienne intra muros notoirement égoïste sur de nombreux aspects, se moquant pas mal des conséquences de ses choix sur les perturbations causée dès le boulevard périphérique franchi. Toutefois, transposé à mille et une agglomérations moyennes ou en deçà, ce principe de la communauté de commune, laquelle paraît plus forte pour des actions économiques mieux appréhendées grâce à une dimension significative, a pour effet de déconnecter la population. Celle-ci ne se reconnaît plus dans des élus locaux qui perdent la main sur de trop nombreux sujets. "La couleur que nous avons élue n'est finalement pas celle qui décide" peut-on entendre de-ci de-là. C'est une douce mais sensible dénégation de la démocratie. Cela va même se loger dans des détails auxquels on ne songe pas instinctivement. "Nos cousins qui venaient nous rendre visite ont eu du mal à nous retrouver", explique une famille qui raconte que leur village a été intégré dans une de ces communautés. Laquelle a adopté un nom "global", faisant disparaître le nom historique du patelin depuis les pancartes jusque sur certaines cartes routières récentes (GPS inclus). Dans ce mouvement désormais bien tendance, des fonctions très élémentaires deviennent des sujets de préoccupation, voire de discorde. Comme le ramassage des déchets ménagers (on ne dit plus "ordures", tout comme on ne dit plus "vieux", mais "seniors"). "On ne peut plus compter que sur une poubelle par mois" vocifère un riverain, qui ajoute que "le maire ne peut rien faire, la communauté de communes a signé des contrats avec un grand groupe de collecte, très difficiles à dénoncer. On n'a plus rien à dire". Plus rien à dire, de quoi donner de plus en plus à certains l'envie de se faire entendre. Un chanson de Claude Nougaro intitulée "Il y avait-une ville" est d'une terrifiante prémonition. Sans que l'on sache si les évolutions évoquées ici se concentrent en un instant sidéral sidérant, ou s'il ne faut voir que la conséquence d'un faux geste d'un totalitaire belliqueux poutinien...
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