INDUSTRIE, L'ACCIDENT...! Entre vocabulaire et "ficelles" de langage, l'échec productif anesthésié.

20 Décembre 2022

Les maux sont moins durs quand des mots viennent à leur secours. Sous-estimer des réalités en les requalifiant consiste surtout à se laisser bercer par le confort de l'auto-mensonge.

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- DVSM, 20 décembre 2022. Un regrettable accident... "Comme la mort de Louis 16" faisait dire Michel Audiard à Jean Gabin dans "Le Pacha", cet excellent film de Georges Lautner. Les dialoguistes de l'industrie se sont-ils rangés sur la voie des formules à mourir de rire, à défaut de mourir économiquement ou, en la circonstance, industriellement.? Le terme d'accident à propos de l'état de l'industrie est réapparu sous la plume de David Barroux, dans une récente et très pertinente analyse parue dans Les Echos il y a quelques jours. En France, et en Europe, face à des concurrents que sont la Chine, c'est presque nouveau, et le toujours vigoureux continent nord-américain ce qui, pour certains, une surprise, l'industrie d'ici est dans une posture délicate. Formule, encore une, que d'autres décrivent avec un peu plus de cruauté comme moribonde dans de trop nombreux domaines. Toutefois, peut-on parler d'accident lorsqu'une jolie plante, faute d'avoir été assez arrosée et correctement entretenue, n'est plus que l'ombre de ce qu'elle devrait et pourrait être.? On a souvent tendance à se référer à l'industrie de l'électronique sur le Vieux Continent pour décrire cette mauvaise dérive qui n'est peut-être pas observée avec toute la rigueur nécessaire. Pour le créneau grand public, Thomson a lâché prise et Philips, la hollandaise qui regardait les autres de sa noble et royale altitude, n'a pas fait mieux. Ces grands d'hier n'ont pas échoué que dans le téléviseur, trop symbolique dans cette histoire. Eindhoven, par exemple, a aussi lâché prise dans l'éclairage (son activité natale) et dans le secteur des composants alors que, dans un travail conjoint avec Sextant Avionique, la firme française fabriquait il y a bien longtemps, du côté de Grenoble, des écrans LCD plats qui auraient pu donner naissance à des filières intéressantes. Et que penser de ces Nordmende, Grundig, Pyle, Nokia, Telefunken, et beaucoup d'autres, de ce qu'ils sont devenus (ou ce qu'il en reste, hors marques commerciales exploitées sous licences).? Hors de cette électronique, et d'un néant quasi absolu dans les hauts niveaux de l'effervescence numérique, d'autres secteurs ne sont finalement pas si bien accrochés à ce qui constitue un avenir serein. Evitons les choses qui fâchent pour de bon, évitons le nucléaire. Mais par exemple, l'automobile, dans sa lente et hasardeuse croisade vers l'électricité serait, selon quelques avis qui semblent autorisés, sur le chemin d'une possible et sévère collision avec l'industrie chinoise. Accident en vue.? N'allons pas plus loin sur ces chemins semés d'embûches, retour vers le vocabulaire.

À Angers, des milliers de téléviseurs furent produits. Puis plus rien. Accident...?

Nous revoici en effet dans cette ère de la phraséologie circonstancielle. Celle qui a fait des individus âgés non plus des vieux mais le troisième âge.; des employés du ménage des techniciens de surface.; des caissières des hôtesses de caisses.; d'une grève surprise à la gare Saint Lazare un mouvement social.; d'un cancer une longue maladie. C'est comme traverser la rue pour éviter un spectacle sordide à oublier avant même de l'avoir supporté. Le vocabulaire est-il devenu de refuge de la trouille, celle que suscite toute vérité toute nue.? La peur est mauvaise conseillère, dit-on. La combattre par l'occultation est encore plus dangereux. Connaître et estimer les dangers (d'accidents) qui, en industrie, se promènent entre concurrence, mauvaises idées et projets mal conduits, est pourtant une bien meilleure stratégie.