Il n'y a que 10 ans, le rendez-vous planétaire d'outre-Rhin ne laissait que fort peu déceler les prémices d'un l'ouragan s'approchant de l'univers encore effervescent de la photo. Pourtant, le futur pouvait déjà y être décrypté.
- DVSM, 2 novembre 2022. Les souvenirs du très récent Salon de la Photo 2022 tenu à Paris, encore tout frais, n'auront été ponctués par aucune indifférence. Ils ressemblent -c'est une image- à ces visions de villes ou régions ayant subi de lourds désastres, guerres ou catastrophes naturelles, et se reconstruisent. Il suffit de se replonger dans les archives de DVSM - le magazine (notamment le numéro 106 d'octobre 2012) dans lequel nous consacrions un vaste dossier sur ces salons dédiés à la photo, celui de Cologne (Photokina) et de Paris, tenu début novembre. A ce moment, prédire le raz-de-marée qui allait aboutir à la situation de l'industrie et du marché de l'univers photo aurait, au mieux, conduit à considérer l'auteur d'une telle prophétie comme justiciable d'un passage par un bon service de psychiatrie. Sauvée d'un désastre frôlé de près dans le passage de la chimie (argentique) au numérique, "la photo" vivait finalement presque mieux qu'avant. Forte de ses capteurs CCD et de ses super-zooms, elle n'allait tout de même pas s'en laisser conter par de vulgaires téléphones dotés eux aussi de capteurs, des quasi-anomalies de la nature. Max La Menace téléphonait de sa chaussure, mais il n'allait pas jusqu'à tirer à l'aide de son soulier le portrait de l'agent 99. A l'automne 2012, la menace, justement, est quand même décelable au détour de quelques rares et rapides remarques. Qui restent du même tabac que le réveil des volcans d'Auvergne. Cela pourrait arriver, il faut faire attention. Pour plus tard, et on ne sera sûrement plus là pour voir ça. L'iPhone, précurseur de la génération smartphone, n'est qu'un jeune équipement d'à peine 5 ans d'âge. On a bien le temps... A Cologne, c'est la cohue. Pourtant, même si la fête est belle, comment imaginer... Regardez plutôt...
Image classique sur le stand Canon, essais avec prises en mains. Pros ou amateurs éclairés observent, examinent, tout un monde, et presque un "entre-soi" .
Prémonitoire : un maquettiste inspiré a concrétisé cette époque future où chacun se demandera certainement ce qu'est cet étrange et énorme objet.
Les noms les plus légendaires et historique de l'argentique vont-ils disparaître, prendre leurs clacs et leurs clics.? Restons raisonnables, pas d'hypothèse irréaliste.
Quand même, le compact qui se met à la sauce hybride, c'est un signe. Le changement est dans l'ère.
L'APN compact, pour se tenir à distance du smartphone, redouble d'attractivité fonctionnelle. Bonne stratégie, mais pour combien de temps...? Ils (industriels) ont failli y croire.
Si le changement reste peu sensible, des acteurs majeurs de l'industrie photo tentent quand même une réplique. Si le smartphone fait de la prise de vue, pourquoi l'APN ne deviendrait-il pas un concurrent télécommunicant.?
Industriellement, les "seconds couteaux" laissent entrevoir, dans des regroupements, le début d'un changement des rapports de force.
En Corée, Samsung est encore au nombre des outsiders, mais le Coréen ne tardera pas à faire la part des priorités. Une entrée compliquée (entre filiales) du groupe dans la photo sera suivi d'une sortie prudente et rapide.
Par une sorte de contournement de l'obstacle, les industriels se réfugient dans le design rétro qui, à défaut de séduire les nouveaux clients, arrondi les angles de la métamorphose pour les anciens.
En réalité, l'industrie de l'APN est déjà partagée entre les historiques de l'argentique, et les historiques de l'électronique, des intrus qui ne se privent pas de leurs conceptions osées.
Ne rien changer dans le geste.! Pourtant, l'attitude du photographe n'a cessé de se transformer au fil des décennies. Le smartphone se prépare à les faire changer à nouveau.
Tout nouveau, le segment de la photo numérique a attiré de nombreux acteurs quelque peu opportunistes.
A chaque époque ses arguments. En 2012, le nombre de pixels du capteur n'est plus aussi primordial, alors que le super-zoom titille les envies. D'autant plus que l'électronique sait prendre le relais de l'optique, d'abord au détriment de la qualité, puis de mieux en mieux. Même sur un smartphone.
Les beaux et grands stands, surtout à Cologne, font partie des figures imposées. Coûteux à tous points de vue, mais incontournables à toute grande légende du métier. Dans ce sens, la photo entre sans le savoir dans la problématique qui touche tous les salons, partout, toutes spécialités confondues. Autre histoire...
C'est bien de l'univers de l'électronique que les turbulences de la techno ont débarqué. Notamment chez "l'inventeur" du "sans miroir", tombeur du reflex.
Pour Sony, qui avait présenté dès le début des années 80 son premier prototype d'appareil électronique (Mavica), l'image était déjà dans la culture de la firme, ne serait-ce que par son omniprésence dans la vidéo institutionnelle puis dans le marché des caméscopes.
Cette mini-galerie est révélatrice. En une décennie, les volumes d'appareils photographiques vendus dans le monde ont fondu. En 2012, le total flirte avec 120 millions d'unités, retombé à environ 12 millions quand en 2020 le coronavirus s'est invité dans le jeu. La Photokina, qui commençait à être mal en point, n'a pas résisté aux coups assénés par la pandémie, en dépit de tentatives de repositionnement vers le début de l'été, et autres parades sans suite. "Paris" a eu de la chance, dans une réalité improbable ayant permis à un organisateur de bâtir un salon pour un monde nouveau, rendez-vous qui doit, pour survivre, ne surtout pas chercher à s'accrocher à un univers photo qui ne reviendra pas, mais s'appuyer sur l'image de maintenant (et ses acteurs, télécoms incluses).
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