La fiscalité en France, qui semble fondée sur le double principe de la tondeuse et de l'éponge, est l'un des rares domaines dans lesquels l'Hexagone sait se maintenir au plus haut niveau mondial. Ce qui n'entraîne pourtant aucune réflexion autre que celles animant les propos de comptoirs et de fins de repas.
- DVSM, 24 octobre 2022. "La confiscatique" : tel pourrait être le terme définissant l'esprit et peut-être la science qui caractérise la pratique de la fiscalité à la française. Dans une conjoncture à présent dominée par de nombreux vents contraires, une réaction prolongée va, ou devrait finir par... s'imposer. Il n'est pas question de contester ici la nécessité absolue pour tout Etat de prélever ce qui est nécessaire au fonctionnement du pays qu'il administre. Cependant, fiscaliser est depuis des lustres une recette trop facile, mono-orientée et appliquée à qui-mieux-mieux par l'administration française. Quand le Roi-Soleil, monarque par la "volonté de Dieu" (allez donc sortir ce genre d'affirmation dans un contrôle de police tard le soir...), affirmait son état "d'Etat", et parce que bon lui semblait, il dépensait tout ce que le brave peuple pouvait cracher de son bas de laine. Et bien au-delà, pour des châteaux (associés à la vie qu'on y imagine) et de chimériques conquêtes militaires. La dépense inconsidérée est depuis la nuit des temps dans l'ADN de l'Hexagone. La ponction en est la résultante, comme le démontrent les près de 500 prélèvements obligatoires en vigueur. La "taxe de plus" est à la France ce que le "dernier pour la route" est au plus solide des pochetrons. La preuve.: à chaque problème, sa taxe. Dans les années 50, le territoire pense à ses "vieux", donc taxe (vignette auto) soi-disant pour eux (on ne parlait pas encore de "troisième âge" ou de "seniors", nos sages et élégantes pudeurs de vocabulaire). "Lip c'est fini" tranche Pierre Messmer, Premier Ministre, en octobre 1973. De cet épisode, qui concrétise un épilogue industriel qui fera date, naît la taxe para-horlogère. En 1976, il fait sec, très sec. Un peu pour compenser les frais inattendus, beaucoup pour ennuyer son potentiel adversaire de Président, Jacques Chirac, Premier Ministre, lance l'impôt sécheresse. N'allons pas plus loin dans cette énumération, il faudrait les débits vertigineux d'une 8 ou 10G pour que la connexion soit adaptée à une aussi longue liste. Autre principe aussi élémentaire que complémentaire : la suppression d'un prélèvement est, par théorème, impossible, infaisable, inenvisageable. A Bercy, y penser est probablement une faute professionnelle grave.
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Long et lourd réquisitoire ? Soit. Ces propos n'ont pourtant rien, il faut le répéter, d'un rejet de toute fiscalité. Mais il faudrait bien tôt ou tard qu'une petite révolution intellectuelle se réveille et fasse pencher la balance d'une tradition bloquante des prélèvements vers une conception nettement plus constructive et incitative des taxes, impôts et redevances. Les blocages récents des carburants constituent une goutte de confirmation dans un océan de faits démontrant l'aberrant fondement de nos plus intimes ponctions. Ukraine et CGT unis pour la circonstance ont, avec les blocages des pompes, entraîné des recettes fiscales qui n'auraient jamais été engrangées si ces incidents n'avaient pas eu lieu. Pour la consommation, le stade de la double peine est largement dépassé. Les taxes et les taxes sur les taxes ont en effet empêché très concrètement des millions d'euros d'aller vers les caisses des magasins, mettant en péril leur équilibre et celle de la chaîne des fournisseurs agissant en amont. Tout en générant des privations et une colère à peine rentrée des consommateurs. Parallèlement, et parce que l'homme est homme et le restera, son comportement naturel l'incite à compenser comme il le peut les pressions qu'il subit. L'excès du prélèvement conduit à voir se développer des astuces parallèles, dont le travail dit "au noir". Et à d'autres ficelles. Ce qui tend à éloigner des emplois normaux des effectifs qui manquent aux entreprises ne parvenant pas à pourvoir de nombreux postes. (Certains affirment que le plein d'aides de l'Etat et quelques-unes de ces "ficelles" permettent à certains ménages de bien mieux vivre que selon des voies plus régulières). "Trop d'impôt tue l'impôt" dit le dicton. Il tue sans le moindre doute bien davantage. Si l'Hexagone a la fiscalité qu'il mérite, peut-être faut-il tout faire pour en mériter une plus efficace. Promis, nous y reviendrons.
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