1964 - 2021 : 57 ans qui soulignent une discordance au moins dans le rythme des olympiades. Les JO de Tokyo qui commencent demain, 9h00 sonnantes, réveillent des souvenirs d'une ampleur considérable.
- DVSM, 20 juillet 2021. Tout réussissait pour le Japon d'hier. Un virus aurait-il eu l'audace de s'inviter dans une aventure qui avait déjà bien changé...? D'abord, rappelons que ces JO 2021 auraient dû être ceux de 2020. Reportés, pour cause de pandémie. Entre annulés pour un an ou annulés pour toujours, les dirigeants ont choisi le coup de force, qui semblait devoir réussir il n'y a que quelques semaines. Le dernier variant en date en a décidé autrement, plongeant l'Empire du Soleil levant dans une atmosphère oscillant entre une indifférence molle et une quasi hostilité inattendue. Presque l'inverse des JO de 1964, qui avaient révélé au monde entier l'émergence de cette nouvelle puissance.
Un Japon moderne, industriel, "techno" avant l'heure, et conquérant (commercialement) entrait soudain sur la scène internationale. Les épreuves sportives et leur organisation mobilisant les ardeurs et les initiatives. Une formidable manière de mettre en vibrations positives tout une peuple selon le mode de "si tous les gars du monde".
Souvenir... Un industriel engagé dans les machines à coudre fut pour ces JO64 sollicité pour créer une imprimante capable de mettre noir sur blanc les chronométrages et résultats des différentes épreuves. Ainsi, fut réalisée cette imprimante référencée "EP-100", qui se prononce... "Epson" en langage local. Les indices du réel de cette grande époque sont nombreux, comme celui-ci, même si les acteurs de 1964, sportifs, industriels, organisateurs, sont depuis longtemps en retraite ou même partis pour un monde meilleur. Alors que ceux qui gèrent Tokyo 2021 n'étaient pas nés, loin s'en fallait, en cette déjà lointaine époque.
L'industrie japonaise fut en suite prodigieusement efficace, non seulement en électronique de loisirs, mais sur de nombreux autres secteurs. Les motos japonaises ont réanimé un domaine qui végétait en Occident, tandis que le monde de la photographie se nipponisait aux quatre coins du monde. Nos trains les plus rapides, entre Paris, Bordeaux ou Toulouse, (Etendard, Capitole..) qui flirtaient depuis peu avec le 200 km/h sur quelques belles sections de leurs parcours, ne parvenaient pas à fasciner autant que ce "Tokaido" (dont le véritable nom, Shinkansen, ne s'est prononcé que bien plus tard sous nos latitudes), un TGV du bout du monde avant l'heure, déjà totalement opérationnel. Bref, Tokyo 1964 était une sorte d'épanouissement en forme de feu d'artifice d'une nation qui allait même aller jusqu'à agacer certains occidentaux. Vers 1980, quand se multipliaient les magnétoscopes japonais (le modèle européen promu par Philips étant déjà embourbé dans un échec irréversible*), le Japon fut désigné par nos dirigeants comme LE responsable de la dérive de notre commerce extérieur, et par ricochet, du chômage, de la désindustrialisation, rien que cela**. Pitoyable aveuglement...
Avec le couac des olympiades qui démarrent, et dont l'ensemble dominante de l'opinion japonaise se résume par un "vite, que cela se termine !", c'est un large repli de cette onde glorieuse qui prend toute sa dimension. Les produits électroniques japonais ont très largement déserté les linéaires, remplacés par une galaxie de MMD, no-names et faux-nez souvent natifs de Chine. Les produits coréens, essentiellement Samsung et LG, tiennent bon, non sans être sérieusement secoués par leurs proches compétiteurs. Là encore, les autres produits industriels nippons suivent la tendance. Un peu comme un virus arrivé sans prévenir, un smartphone s'est propagé, chassant sur les terres d'une photographie japonaise toujours très performante, mais ne reposant plus économiquement que sur les miettes restant de ce que fut un monde de l'image qui avait pourtant relativement bien géré le passage au numérique. Après Toyota (qui vient hier de retirer ses annonces publicitaires liées aux JO, quel symbole...!), Honda ou Nissan, ce sont les Hyundai, Kia et autres coréennes qui font mine de préparer le terrain à des productions de l'Empire du Milieu. L'énumération pourrait être longuement poursuivie.
Mais il ne faudrait pas enterrer un Japon qui est certes touché, mais pas coulé. Ses grands groupes existent toujours, et tournent progressivement la page. Si on ne les voit plus autant en têtes de gondoles, ils conservent des atouts. Sony surfe sur le créneau des capteurs d'image et le jeu vidéo, Panasonic est souvent à bord sur les aéronefs des plus récentes générations, la chimie japonaise reste au meilleur niveau pour les matériaux indispensables aux composants clés, et son industrie a battu cette semaine le record mondial absolu de transmission de données par fibre optique.*** Toyota, évoqué ci-dessus, reste le premier constructeur mondial d'automobiles****. Tout comme l'ensemble du pays brûle d'une impatience à l'idée de tourner la page de ces jeux installés sur des bases d'un autre temps, c'est à une nouvelle page blanche de conquêtes que le peuple nippon aspire sans doute. Sans public, les JO ne vont reposer que sur les droits TV, donc sur l'audience, laquelle, pour le sport, n'est peut-être plus tout à fait ce qu'elle fut... De là à se demander les disparitions, constatées ou redoutées, attribuables au coronavirus, il n'y a qu'un pas.
* L'échec de Philips, qui a développé plusieurs variantes, du VCR au V2000, ne fut pas lié à la technique, mais à l'incapacité du groupe hollandais (dont le premier marché d'exportation était la France) de s'imposer sur des marchés clés, dont celui des USA.
** Il y aurait à porter un regard d'ampleur -au goût amer- pour faire le tour d'une dérive monumentale de nos activités dans ces années 70-80, véritables points de départ d'une désindustrialisation à la française, aujourd'hui dénoncée (et attribuée à des causes inexactes). Le relationnel débordant entre pouvoirs politiques et grandes entreprises nationales y avait tenu une place déterminante.
*** Impossible de ne pas mettre ce détail en parallèle avec le retour sur notre sol, glorifié sur le registre d'une industrialisation renaissante, de la fabrication de comprimés de paracétamol.
**** Preuve que cette firme a même réussi à éviter les pièges, règlements de comptes, coups bas et planches savonnées (comprenez "Dieselgate") qui a mis à mal toute et seulement l'industrie automobile européenne. Auriez-vous dit "bizarre"...?
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