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D'éminents responsables viennent de se pencher sur ce que certains appellent la désertification du centre-ville. Comment ressusciter une activité que, dans bien des endroits, on a laissé mourir, et même parfois patiemment assassinée ?

C'est la Secrétaire d'Etat en charge du commerce Martine Pinville* qui a tenu en personne il y a quelques jours les "Assises pour la revitalisation économique et commerciale des centres-villes". Ce en réaction à la publication d'un rapport signé de l’Inspection Générale des Finances et du Conseil Général de l’Environnement et du Développement Durable sur la revitalisation commerciale des centres-villes. Lequel "dresse le constat préoccupant de l’aggravation de la désertification commerciale des cœurs de villes" s'émeut-on à Bercy. C'est bien de s'en apercevoir, même si le mal constaté ne date pas d'hier, et que les nombreux acteurs concernés ont depuis des années tiré un signal d'alarme que personne ne semblait entendre assez pour que des décisions reconstructives soient prises.

Un problème lié d'abord à la démographie est à l'origine profonde de cette situation, qui voit les avenues perdre leurs enseignes, les boutiques devenir vacantes tandis que les activités commerciales et économiques se transportent vers les périphéries. En un demi-siècle, la population s'est accrue et les jeunes générations sont allées vivre en périphérie des zones urbaines, ces dernières étant déjà occupées. L'afflux de populations nouvelles a généré des initiatives multiples : créations de commerces, implantations d'entreprises, de lieux de loisirs, d'établissements à vocations multiples. Dans de nombreuses agglomérations, les centres hospitaliers ont migré vers les banlieues afin de pouvoir développer des installations modernes et assez grandes pour assurer les soins dont elles ont la charge, les gares des trains à grande vitesse ont suivi le mouvement, et même certains services administratifs ont été mutés dans des parcs d'activité. Dans les grandes et les moyennes agglomérations, une majorité d'habitants vivent dans ces zones périphériques. Ainsi, exemple extrême mais représentatif, sur les près de 11 millions d'âmes qu'abrite la région parisienne, seulement 2 millions environ sont résidants intra-muros. Cette fameuse et compréhensible proximité, pour une majorité écrasante d'individus, n'est donc plus dans le centre-ville, mais en dans ces périphéries nées du phénomène bien connu de la périurbanisation, observé dans la plupart des pays occidentaux, et qui a été particulièrement vigoureux dès les années 80 (du 20ème siècle).

Loin d'apporter les correctifs nécessaires à un maintient d'une activité intra urbaine nourrie, élus et autres éminents planificateurs de la vie des autres ont surtout fièrement assouvi leurs fantasmes, multipliant les rues piétonnes, les entraves à l'approche des automobiles, les chantiers pharaoniques d'installations de lignes de tramways, etc. La tendance n'est d'ailleurs pas encore inversée, même si, notamment depuis les dernières élections municipales, des municipalités fraîchement élues ont commencé à faire machine arrière, par exemple en rendant gratuit le stationnement. Hélas, cela ne suffira pas. Les structures urbaines et périurbaines sont désormais ce qu'elles sont, avec leurs défauts, et des consommateurs qui ont pris des habitudes n'en changeront pas à court terme.

Les assises dont il est question ici laissent en outre perplexe sur la nature de la réaction. "Cet évènement visait à croiser l’expérience de diverses parties prenantes" indique le ministère, et de les citer : élus, organismes intermédiaires, experts de l’ingénierie et de l’urbanisme. Il manque selon nous au moins deux types d'intervenants : les professionnels du commerce, qui seraient sans doute capables d'expliquer pourquoi ils s'implantent dans certains lieux, et ne le font pas dans d'autres. Et les citoyens ? Allons, pourquoi les entendrait-on, eux qui, certainement, n'y connaissent rien.    

Des initiatives quelque peu désuètes, risquaient de ponctuer ce moment de réflexion qui a malgré tout eu le mérite d'exister. Ainsi, voici venir " L’ouverture du portail "cœur de ville" destiné à rassembler l’information sur l’ensemble des partenaires et dispositifs existants ainsi que les bonnes pratiques observées dans les territoires. Ce portail fait ainsi figurer des liens vers les sites Internet des organismes, qu’ils soient acteurs ou centres de ressources, impliqués dans la revitalisation des cœurs de ville. Il recense également les villes engagées dans une stratégie de revitalisation et renvoie vers les descriptions de leur stratégie globale".

Et dans la foulée, est annoncé "Le lancement d’un nouvel appel à projets du Fonds d’intervention pour les Services l’Artisanat et le Commerce (FISAC) au titre de l’année 2017, qui sera mis en ligne dans les prochains jours. Le FISAC pourra intervenir pour des opérations collectives visant notamment à moderniser, diversifier, rendre accessibles physiquement et numériquement, et sécuriser des commerces de proximité, non seulement dans les Zones de Revitalisation Rurale (ZRR) et dans les Quartiers de la Politiques de la Ville (QPPV), parmi lesquels se trouvent déjà des centralités dégradées, mais également désormais hors des QPPV, dans les centralités commerciales connaissant un fort taux de vacance." Nous sommes bien en lieux "officiels", avec tous les clichés et poncifs que cela suppose. Sans oublier la notion de proximité, ce qui sous-entend que les ambitions semblent limitées à ne pas voir s'évader les populations locales, mais n'évoque en rien une volonté d'attraction des populations périphériques. Martine Pinville, qui déclarait que : "le centre-ville est un lieu privilégié pour ancrer l’activité économique", (que ne le dit-elle à la maire de Paris) irait-elle jusqu'à investir ses propres économies pour se lancer dans l'ouverture d'un magasin de quelque domaine que ce soit ? Et en mûrissant sa réflexion, ne finirait-elle pas par estimer moins périlleux de trouver une cellule vide bien placée dans une galerie marchande au cœur d'un actif bassin de consommation ?

Il fallait prévenir avant de guérir. La situation n'aurait pas été aussi préoccupante si, dans un passé déjà lointain, des initiatives tournées vers des projets plus musclés avaient été favorisées. Un exemple qui est de surcroît en pleine actualité est à méditer. Au cœur de Nîmes**, le centre commercial de la Coupole des Halles (photo) – qui va accueillir dès ce mois de mars une nouvelle implantation de Docteur IT, enseigne spécialiste de la réparation de tout ce qui est numérique- est de ces moteurs d'activité qui vivent, parallèlement à des zones périphériques très animées.    

*Martine Pinville, secrétaire d’Etat chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation, et de l’économie sociale et solidaire.

**Nîmes où justement, Martine Pinville a inauguré, le 2 mars 2017 l’Institut de formation et des métiers de l’artisanat (IFMA) en présence de Carole Delga, présidente du conseil régional Occitanie. L’institut permet aux jeunes de 16 à 25 ans de se former aux métiers de l’artisanat tout en étant salariés dans une entreprise.

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Tag(s) : #L'info en temps réel, #- TOUT LE COMMERCE
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